« Tetro » est un film de Francis Ford Coppola avec Vincent Gallo, Alden Ehrenreich, Maribel Verdu.
Synopsis :
Tetro est un homme sans passé. Il y a dix ans, il a rompu tout lien avec sa famille pour s’exiler en Argentine.A l’aube de ses 18 ans, Bennie, son frère cadet, part le retrouver à Buenos Aires.Entre les deux frères, l’ombre d’un père despotique, illustre chef d’orchestre, continue de planer et de les opposer.Mais, Bennie veut comprendre. A tout prix. Quitte à rouvrir certaines blessures et à faire remonter à la surface des secrets de famille jusqu’ici bien enfouis.
Avis :
Un film qui m’a enchanté.
La première chose qui m’a frappé dans ce film, c’est son visuel. La vache ! Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas eu l’impression de voir un film où chaque plan, chaque mis en scène semblent penser et conçu avec soin (il y a bien les films de Wes Anderson, mais lui c’est tellement sa marche de fabrique). La vache (encore), j’ignorais que Coppola pouvait être un aussi bon réalisateur ! Je pense qu’il a bien fait de quitter le star-système pour faire ce film, bien plus intimiste que ces autres productions.
La réalisation est très intéressante, car le film est en noir et blanc, dans un format « normal », sauf pendant quelques séquences flash-back où là l’image est en couleur et dans un format « plus petit » (désolé, je ne connais pas les formats des pellicules). Les codes de la mise en scène sont presque inversés : généralement, la couleur est pour le présent et le N&B pour les flash-back.
L’ambiance du film aussi est particulière, car on a du mal à saisir la temporalité. On ne sait jamais trop à quelle époque on est : s’il n’y avait pas eu le pc portable de la firme à la pomme, je serais restée encore plus dans le vague.
Ensuite, il y a quelque chose qui m’a frustré dans ce film. En effet, je pense que je suis passée à côté de beaucoup de messages, d’interprétations. Parce que, soyons honnêtes, j’ai beau essayer de me considérer comme une cinéphile, je pense que je suis plus « consommatrice de film » qu’« amatrice ». Bref.
Je pense notamment à la place du miroir. En effet, l’objet est très présent dans l’appartement que partage Tetro et sa compagne. De plus, le jeune Benny utilise un miroir pour retranscrire les écrits de son frère. Mais outre l’objet, on sent que le parcours des deux frères se fait quelque peu en miroir : les deux se sont sauvés des griffes de leur père ; Tetro a une jambe dans le plâtre quand nous le découvrons, puis Benny se retrouve aussi dans le plâtre ; l’un se détend et s’’humanise presque, tandis que l’autre sombre. Et je pense qu’il y a aussi un jeu de renvois avec Abelardo, l’écrivain un peu raté, mais confiant dans ses capacités.
Dans ce film, Coppola évoque les liens de la famille. Nous avons donc Angelo, alias Tetro, auteur qui a fui sa famille. Un jour, son petit frère Benny débarque et désire plus connaitre ce frère qui l’a abandonné malgré sa promesse de revenir le chercher.
Sans trop rentrer dans les détails, on voit comment la présence d’un père tout puissant, autoritaire et dont les valeurs diffèrent de celles de ses enfants, entraine le malheur dans sa propre famille. Enfants (Benny, Tetro) et même frère en souffrent. On a aussi, peut-être, un renvoi à l’idée de patriarche riche et célèbre qui entraine sa famille à sa suite, mais tout en l’écrasant (autoportrait de Coppola et sa famille ?). On sent aussi le mépris d’un père pour sa progéniture si celle-ci ne fait ce que lui désir.
L’histoire est aussi une histoire de souffrance : personnelle, familiale, relationnelle. Je ne vais pas trop développer de peur de dire des bêtises, mais même chez les personnages secondaires, Coppola développe des types de liens étranges, parfois comique (José et sa femme qui s’adorent et se détestent à la fois), parfois tragique (comme Tetro et Alone).
Mais il y a aussi des choses intéressantes que je ne suis pas parvenue à complètement décrypter. En effet, Tetro explique à Benny sa volonté de couper tous les ponts avec sa famille. Or le nom de sa famille, c’est Tetrocini. C’est assez paradoxal de vouloir se couper de sa famille, mais de prendre comme pseudonyme une section de son patronyme : Tetro.
Je pense qu’il y a aussi tout un travail sur la recherche de la gloire et de la célébrité, sur le désir d’être reconnu par ceux que l’on estime ces pairs.
Tetro est vraiment un film que j’aurai adoré. Visuellement, j’ai été bluffé avec sa réalisation tout en puissance et en force.
Pour le reste, un sentiment de frustration puisque je sens que je suis passée à côté de certaines choses.
C’est un film que je recommande chaudement et que je prendrais plaisir à revoir dans quelques années, en espérant que j’ai plus d’éléments pour le décrypter.